Excalibur 2021 interviewe les Couteaux Morta

LA REVUE EXCALIBUR 2021 SE REPOSE À L’OMBRE DU MORTA

La revue Excalibur, numéro 1 des magazines consacrés aux couteaux, publie, au premier semestre 2021, un article intitulé « À l’ombre du Morta ». Fred MARCHAND, coutelier de métier, et Didier Teste, journaliste, interviewent Jean-Henri PAGNON. Jean-Henri, qui dirige l’atelier éponyme JHP, atelier de coutellerie artisanale, situé à Saint-André-Des-Eaux, en terre de Brière et qui fabrique les fameux Couteaux Morta.

« Il n’y a pas de mauvais aciers, mais de mauvaises émoutures et de mauvais traitements thermiques » JHP.

Retour sur cette entrevue en forme de table ronde. Des questions/réponses entre professionnels au service des amateurs de fines lames. On vous dit tout de l’Atelier JHP.

Excalibur 2021 interviewe les Couteaux Morta

EXCALIBUR 2021 | LA REVUE DE COUTELLERIE S’INTÉRESSE AU MORTA

Petit flashback journalistique sur la star locale, le Morta. Enfoui pendant 5 000 ans dans les marais de Brière, le Morta est un bois en cours de fossilisation. En effet, alors que la forêt de chênes brièronne s’est retrouvée absorbée par le sol, suite à un bouleversement géologique, les troncs ont été protégés par la tourbe, faisant office de sarcophage naturel. Aujourd’hui, les artisans de l’atelier JHP, nous l’extrayons manuellement de la terre pour le travailler et en faire des manches de couteaux. Nous ne nous équipons que de pelles, de pioches et d’une sonde pour partir à sa recherche et le ramener en surface.

INTERVIEW DE JEAN-HENRI PAGNON | ARTISAN COUTELIER DES COUTEAUX MORTA

Fred Marchand, artisan coutelier : Parlez-nous de l’extraction du Morta

Les clients sont souvent surpris de la « petite » longueur de la sonde. J’en parlais justement aux journalistes de l’émission « Faut pas rêver ». Croyez-moi, la profondeur n’est pas représentative des efforts à fournir pour extraire les troncs. Il y a plus de sueur qu’il n’y paraît sur cette perche.

Didier Teste, journaliste : Comment as-tu obtenu l’autorisation de prélever du morta dans le parc régional de Brière ?

Ah ! Bonne question ! Un peu d’histoire ! En 1462, le duc de Bretagne François II a donné ses terres à ses vassaux. Encore aujourd’hui, l’ensemble des habitants de la Brière, dont je fais partie (domaine indivis) est propriétaire de ces marais. Je me suis donc adressé au syndic qui m’a accordé l’extraction. Grâce à ce matériau, je participe à poser un regard nouveau sur la Brière.

Didier Teste : Comment as-tu découvert le Morta ?

Par hasard ! Éternel amoureux de la coutellerie, quand je suis arrivé dans la région qui, elle aussi, m’a conquis, j’ai cherché le couteau local. Je voulais absolument avoir le même couteau que tous les Briérons. Et là, je me suis aperçu qu’il n’y en avait pas. Je me suis donc attelé à la tâche et, après cinq ans de bricolage, j’ai lu « La Brière » de Châteaubriant. C’est lui qui m’a appris l’existence de ce bois. Ensuite, les copains m’ont expliqué où le trouver.

Fred Marchand : Quelle étape de ton travail préfères-tu ?

Pour répondre, je te cite Bénabar : « le bonheur ne se compte pas en lingots, mais en petite monnaie ». C’est la globalité de ce que je fais qui me passionne. C’est une source de créativité, un terreau de l’imagination et je ne parle pas seulement de fabriquer un nouveau couteau, mais de la façon de le présenter, de le distribuer, de communiquer et de le mettre en image. C’est l’ensemble du métier qui est absolument exaltant.

Fred Marchand : De cabane de jardin, tu es passé à un atelier de 120 m2 avec 4 salariés. Comment un tel changement infuse en toi ?

Je suis partagé entre le sentiment d’être acteur du développement de mon activité et de le subir. À la base, mon souhait était de créer une marque. Alors qu’on me traitait gentiment de « fada », je me suis lancé et j’avoue que je n’imaginais pas aller si loin.

Didier Teste : Grandir encore ne te fait pas peur ?

À vrai dire, c’est un vrai sujet de réflexion. Mais c’est également un besoin réel. J’ai la chance de pouvoir me reposer sur mes collègues aux savoir-faire spécifiques et aux compétences solides. Je vais donc m’investir dans la recherche d’un nouveau local pour mieux répondre à la demande. Mon atelier est carré, fonctionnel, mais aussi déconnant. Et ça, ça me ressemble !

Didier Teste : Un commentaire sur ton site dit que « le morta est un couteau vivant ». Qu’est-ce que cela t’inspire ?

Un sourire bienveillant ! Les gens viennent ici, passent un bon moment et partent en nous remerciant. L’atelier JHP, c’est une aventure humaine, avant tout.

Et Fred Marchand rajoute :

Les clients déclarent qu’ils bénéficient d’une rencontre quand ils achètent un couteau. On n’achète pas seulement une lame et un manche, mais aussi un peu de l’âme du coutelier.

D’INTERVIEWÉ JE DEVIENS INTERVIEWER

Jean-Henri Pagnon à Fred Marchand : ton couteau porte ta patte, aux allures « old school ». Une stratégie commerciale ou la résultante d’une sensibilité, d’un goût et d’un caractère ?
Une approche marketing, c’est vrai, mais en second lieu. Pour moi, le style, c’est un design et des finitions. Les finitions naissent de mes compétences, de ma patience et de mon matériel. Total, elles sont « roots ».

LE MORTA | SACRÉE MATIÈRE PREMIÈRE OU MATIÈRE PREMIÈRE SACRÉE

Sachez qu’il faut 15 à 20 troncs, de 5 à 10 mètres chacun, par an pour alimenter l’atelier JHP. Après avoir été débités, ils sont stockés 2 ans pour le séchage, qui sera finalisé par un passage en étuve. C’est en septembre/octobre que nos couteliers extraient le bois. À cette période, le niveau d’eau est bas et permet au véhicule de mieux circuler. À savoir que seuls 10 à 20 % de la matière seront utilisables. La recherche du morta n’est donc pas un fleuve tranquille.

Propos recueillis par Didier Teste pour le numéro 100 de la revue spécialisée Excalibur, premier semestre 2021.

Ce travail de précision artistique donne naissance à une magnifique collection de couteaux. Couteaux pliants, couteaux fixes et couteaux de tables et de cuisine.
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